Rencontre divine dans la forêt... ( PV Seth )

« - Tu peux t'en aller si tu veux, mais je te pris de m'écouter avant... Après tout, discuter n'a jamais tué personne ? Si ? Bon voilà, si tu est intéressé, rejoins moi autre part, dans l'océan des cauchemars... »

Ces dernières paroles prononcées par Seth revinrent à l'esprit de Narcisse. Le dieu était tranquillement étendu sur le sol moelleux de la forêt des rêves-bleus, où enfin il pouvait se reposer. Que cela faisait longtemps qu'il n'avait pas été tranquille, seul ! Il regarda autour de lui, ses yeux grands ouverts pour détecter la présence d'un infortuné qui aurait le malheur de venir troubler sa paix. Normalement, Narcisse n'était pas du genre à blesser autrui physiquement, mais aujourd'hui, son impasse avec un démon du Pandémonium ne l'avait pas réjoui et il ne se sentait pas d'attaque à une joute verbale. Les mots l'avaient épuisé, pour ainsi dire. Scrutant avec attention les buissons bleutés et les troncs des arbres qui s'entremêlaient par endroits, il ne devina la présence de personne. Enfin ! Il soupira un long soupir d'aise. Seth n'avait pas été un adversaire aussi puissant qu'il l'aurait cru d'un démon de son niveau... Ou était-ce lui qui était plus puissant que les divins ? Il n'écarta pas cette hypothèse, heureux de pouvoir flatter son ego une nouvelle fois. L'obscurité commença à assombrir la forêt des rêves-bleus, et le spectacle fut ahurissant ; de partout des lueurs bleutées s'envolèrent dans les airs et vinrent illuminer le décor, formant des ombres qui dansaient sur l'herbe et sur les rochers. Mais le ciel se couvrit à son tour et bientôt, une fine pluie tomba sur les bois. Ces faibles gouttelettes se changèrent rapidement en forte averse et le loup se releva, courant à travers bois à la recherche d'un trou ou d'un tronc d'arbre mort assez gros pour l'abriter. La pluie l'aurait rapidement empêché de voir à plus de quelques pas devant lui si il n'avait pas trouvé ce trou, dans la paroi rocheuse qui indiquait la fin du bois. Il y entra, pour découvrir une gigantesque grotte qui ne semblait pas naturelle. Une faible lueur orangée brillait vers son fond et quelques gouttelettes arrivaient à pénétrer dans la caverne, mais pas assez pour le mouiller si il s'éloignait vers le fond total. Puis une ombre se dessina sur la roche à mesure qu'il avançait, tracée par les ondulations du feu devant la silhouette. Narcisse continua de s'approcher pour enfin deviner le loup qui formait l'ombre ; Seth !

« - Alors très cher? On a décidé d'écouter son ennemi? Bien... Comme tu dois déjà le savoir, je devrais être sous les ordres de Lucifer et Pandore, mais c'est plus compliqué que ça... Et d'ailleurs, avant de continuer, je voudrais te demander : es-tu pour ou contre Pandore? »

Les paroles de Balor formaient un puissant écho dans l'énorme grotte, et dans d'autres circonstances, Narcisse aurait ri de la ridicule ampleur qu'avait pris de si simples paroles. Pour ou contre? Qu'est-ce que c'est que cette notion que presque aucun solitaire ne peut connaître? Le bien et le mal n'existait pas, c'était évident. Tout était une question de perception. Et être pour ou contre quelqu'un nous plaçait définitivement dans une situation de "lumière" ou "d'obscurité", et Narcisse détestait ce concept. Il grimaça, vaguement écoeuré par la question de Seth.

- Pour ou contre? Qu'est-ce que cette affreuse question? Une autre notion à apprendre du merveilleux concept qu'est le bien et le mal, inventé par des membres de clan trop orgueilleux pour avouer que leurs idéaux ne correspondaient pas aux perceptions des autres? Je ne suis ni pour, ni contre, voilà tout. Je suis ce que je suis, je suis ce que je serai et jamais je ne me placerai d'un côté ou d'un autre. Je suis un Dieu, pardi! Si je venais à mourir dans cette guerre, je quitterai seulement cette superbe enveloppe corporelle pour retrouver toute ma splendeur et ma luminosité divine! En quoi cela serait-il une mauvaise chose?

Sur ce, Narcisse se recoucha, car il était inutile de répliquer quoi que ce soit de plus. Des goutelettes de pluie tombaient par un mince interstice dans le toit rocheux, mais elles s'évaporaient assez rapidement dans la grotte et n'étaient pas en quantité suffisante pour être nuisibles. Des branchages montaient le long des roches des murs, avec quelques fleurs qui poussaient çà et là sur ces branches. De merveilleuses jonquilles aux teintes ensoleillées, des petites violettes timides qui hésitaient à faire leur place et toutes sortes d'autres merveilles qui n'avaient pas nom en notre monde. Ces fleurs propulsaient d'impressionantes effluves à travers l'entièreté de la pièce principale de la grotte, et de légères spores bleutées pénétraient dans la caverne par la grande entrée inondée par une cascade d'eau qui coulait du toit. Narcisse entreprit de sécher son pelage déjà trempé par la pluie et jeta un regard provocateur à Seth.

Il retourna vers l'entrée de la grotte, décidé à en sortir. Cette stupide notion de bien ou de mal! Ça n'existait pas, ce n'était qu'une invention créée par des loups dominants et orgueilleux qui refusaient de se plier aux règles créées par les dieux. Par lui! Par Narcisse! Lui-même avait contribué à l'édification des Règlements principaux du monde, ceux qui régissaient les loups qui vivaient en ces terres, ceux qui avaient permis jusqu'à l'existence même de la Vie. Et d'imbéciles créatures inférieures à lui qui essayaient de contourner ces lois avec les principes de bien et de mal! Narcisse soupira. Découragé par la vie canine qui régnait en maître, mais qui ne connaissait que la vie d'esclave, il renonça à quitter pour entendre ce que Seth en pensait.

« - Bon... Je reformule : Veux-tu que Pandore poursuive ce qu'elle fait en ce moment, c'est-à-dire semer la tyrannie? »

Narcisse leva un sourcil de perplexité. Semer la tyrannie? Une simple mortelle comme Pandora? Il se reprit. L'impératrice de la mort n'était justement pas qu'une simple mortelle, et elle pouvait si elle le désirait rammener du monde des morts les corps inanimés avec l'esprit qui l'habitait avant son dépouillement. C'était une louve immortelle, dominante, suivie de près par une centaine de morts-vivants prêts à la servir du mieux qu'ils le peuvent. Après tout, c'est grâce à elle qu'ils sont revenus à la vie, et à peu près personne ne souhaite quitter ce monde, même si selon le Dieu de la beauté, il est morne et sans intérêt.

- Semer la tyrannie? Mais mon cher, si Pandore détruit un monde de cet envergure, il serait très aisé pour moi de le redessiner à ma façon, à mon image!

Sur ce, il agita sa queue pour bien montrer l'encre noire qui dégoulinait entre les poils beiges de son pelage. Des petite goutelettes sombres se déposèrent sur le sol suite à cette démonstration, et pour bien appuyer ses propos, il traça avec sa queue une forme plutôt abstraite dans les airs qui se transforma bien vite en un petit papillon, virevoletant, vivant et respirant. Il s'envola et sortit par un interstice dans le plafond rocheux.

- Si tu vois ce que je veux dire... Bref, un Dieu de mon accabit n'a rien à prouver à une simple louve comme Pandore. Malgré sa puissance phénoménale, elle ne peut se l'avouer elle-même, elle n'est pas fait du même bois que les Dieux, et surtout que moi. Il serait facile pour moi de retirer la vie à l'impératrice de la mort, mais puisqu'il me serait complètement inutile - et surtout, salissant - de le faire, je m'en abstiens. Je ne prends pas plaisir à voir un corps gigoter dans son sang et couvert de plaies, je trouve ça immonde. En bref, la tyrannie de Pandora ne m'affecte et ne m'affectera jamais.

Ce n'était pas des paroles en l'air, et tout le monde le savait, sauf probablement Balor. Depuis le début, il semblait montrer beaucoup de méfiance envers Narcisse, mais ce n'est surement pas lui qui est une menace pour lui... À vrai dire, Narcisse préfère ne pas se mêler des affaires des mortels, et s'il est dans leur monde actuellement, c'est uniquement pour des raisons de plaisir et d'ennui qui l'ont poussé à quitter le monde Divin pour venir se divertir à un endroit où les gens fuient pour sauver leur vie. Ce genre de choses n'arrivaient jamais là-haut, faut-il croire, puisqu'aucun Dieu n'a peur de perdre la vie...